Pourquoi avoir d’abord soutenu la candidature de France 2023 puis être devenu sponsor de l’événement ?
"Le groupe SNCF est engagé avec les Fédérations sportives pour les grands événements sportifs organisés en France depuis 1992 et les Jeux Olympiques d’hiver d’Albertville, souvent en tant que transporteur officiel comme pour la Coupe du monde de football 1998. Au début, cet engagement se faisait uniquement au titre du service public puis, depuis 2007, nous sommes devenus des partenaires marketing plus forts, souvent des coorganisateurs car il s’agit d’imaginer la mobilité éphémère de ces événements, ce qui nous permet de mettre en avant le faible bilan carbone de nos modes de transport. Nous allons coconstruire, comme pour la Coupe du monde féminine 2019, le plan de transports de France 2023.
En 2007, pour la Coupe du monde de rugby en France, nous avions aussi établi le plan de transport des équipes en train, un défi qui avait eu un fort retentissement en interne. Claude Atcher était déjà présent avec nous en 2007, il nous avait sollicités pour l’aider à monter l’appel d’offres pour 2023. Le rapprochement ensuite pour l’événement en lui-même s’est fait naturellement, d’autant plus que le rugby possède et propose des valeurs proches des nôtres : c’est un sport ancré sur le territoire et humain. Enfin, le GIP partage notre responsabilité environnementale et sociétale.
Fort de ces belles vitrines pour nos savoir-faire, les fédérations reviennent nous solliciter car la mobilité est un sujet critique dans les dossiers de candidatures. La SNCF est multimodale (train et bus pour les derniers kilomètres) et peut aussi intégrer dans son offre la prestation et le savoir-faire de sa filiale logistique Geodis. Pouvoir proposer ce tryptique train, bus et logistique est un avantage auprès de nos partenaires."
Le Train mis en place par le GIP France 2023 est-il aussi un train « marketing » pour la SNCF ?
"Nous allons assurer deux « roadshows » en train pour France 2023 via une filiale spécifique dédiée aux trains expositions. Le premier (du 08/09 au 12/10/2020) permet de présenter sur tout le territoire le programme RSE de la Coupe du monde 2023. France 2023 est un GIP avec un projet sociétal important et ne peut être réduit à de l’entertainment sportif. Le second train, prévu pour 2022-2023, sera un train plus promotionnel, à quelques mois de l’événement, où la SNCF sera présente comme je l’espère les autres sponsors officiels. Il y aura à ce moment-là de nombreuses animations en gares, des goodies à gagner sur place ou via les réseaux sociaux, etc. En 2007, ce train promotionnel avait connu un succès monumental et le rugby avait gagné en notoriété et en sympathie à l’époque.
Le « roadshow » n’est pas systématique dans nos accords, cependant nos gares jouent toujours un rôle d’accueil et d’orientation durant ces événements sportifs. Depuis 1992, aucun de nos partenariats ne se ressemble avec d’abord plutôt le transport des officiels et des spectateurs avant de commencer à affréter des trains spéciaux pour les équipes en 2007. On a ensuite jumelé ces prestations avec les bus des équipes. Puis, en 2016, on a monté des trains spéciaux pour les spectateurs, notamment les Anglais et les Belges. En 2019, nous avons réalisé un mix entre logistique et transport pour les équipes (dont 35 % en bus et 35 % en train), un scénario que l’on espère reproduire en 2023, mais en accentuant davantage sur le train pour passer à 80 % des trajets via le ferroviaire. Côté logistique, on aura sûrement un rôle à jouer, mais en marque blanche, DHL (logistique) étant partenaire de World Rugby."
Comment dressez-vous le bilan de votre engagement auprès d’un grand événement sportif ?
"Un événement réussi pour la SNCF se mesure autour de quatre pilliers :
1. La dimension business, car ces accords de prestation n’excluent pas de faire des tâches supplémentaires facturées et/ou du business croisé avec d’autres sponsors. Il y a le « showcasing », à savoir de démonstration de nos savoir-faire, car bénéficier d’une caution comme l’UEFA ou FIFA ainsi que de leur recommandation nous aide dans certains appels d’offres. Cela fut le cas pour les Championnats d’Europe d’athlétisme en France (finalement annulés à cause du Covid-19), qui sont venus nous voir pour une « prestation bus », suite à ce que nous avions fait pour la FIFA lors de la Coupe du monde féminine 2019.
2. La dimension ressources humaines (RH) et l’engagement de l’interne. Il s’agit de savoir comment faire vivre cet accord en interne, comment s’en servir pour notre politique employeur et travailler le sujet de « fierté ».
3. La dimension image, à la fois BtoB (rejoignant aussi le premier point), BtoC et institutionnelle, soit notre aura de facilitateur fiable auprès du grand public et des touristes internationaux. Ainsi, nous avions adopté deux angles de communication pendant le Mondial féminin 2019, avec une campagne plutôt dédiée aux jeunes 15-35 et une avec l’angle de la féminisation de nos métiers, avec une mise en valeur de métiers techniques opérés par des femmes.
4. La dimension économique, celle de la bonne gestion économique de projets. Chaque euro investi doit l’être selon une stratégie claire et une politique claire, et le tout être mesurable via des KPIs adaptés à la situation et la conjoncture.
L’objectif pour France 2023 sera donc de créer des opportunités sur ces trois dimensions et de faire en sorte que cela cadre sur la dimension 4, la dimension économique."
La SNCF a été partenaire de la candidature de la Ville de Paris à l’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques d'été 2024. Comme pour France 2023, peut-on s’attendre à ce que vous soyez partenaire des Jeux de Paris ?
"Quoi qu’il arrive, la SNCF sera un « partenaire technique » du COJO et des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024 car, au même titre que la RATP, nous allons devoir produire un plan de transports hors du commun pendant cette compétition. Nous serons là via un acte de service public, la dimension de partenariat marketing n’est pas à l’ordre du jour chez SNCF. En revanche, nous avons déjà une équipe dédiée aux JO en interne, laquelle travaille d’arrache-pied depuis un an déjà."
Envisagez-vous d’élargir votre dispositif des athlètes SNCF en vue des JO 2024 ? Comment sont-ils mis en valeur en interne ?
"La particularité de notre dispositif athlètes SNCF est d’avoir près de 40 ans. Nous avons des athlètes sous contrat depuis 1982, alors que le pacte de performance n’existe que depuis 2015. Ce dispositif s’inscrit dans notre politique de diversité. L’ensemble des sportifs sont salariés de l’entreprise avec des emplois du temps aménagés, et la possibilité d’effectuer leur reconversion au sein de la SNCF. Ils ont, au contraire de contrats d’image plus classiques, la possibilité d’apprendre un métier, de se former, de participer à la vie de l’entreprise dans une équipe. Ce dispositif est axé sur l’accompagnement humain et l’inclusion.
La jauge maximale est de 35 sportifs sachant que nous comptons aujourd’hui 32 sportifs sous contrat dont six handisportifs. Chaque année, certains quittent le dispositif car ils se reconvertissent ou mettent un terme à leur carrière de haut niveau.
Pour la SNCF, l’intérêt est d’avoir des talents sportifs susceptibles de réussir leur reconversion, qui intégreront et resteront dans ce Groupe avec, de par leurs parcours de haut niveau, des « soft skills » (compétences comportementales) au-dessus de la moyenne des employés. 80 % des athlètes continuent à la SNCF après leur carrière sportive."
Un nouveau sportif de haut niveau, Vincent Milou (skateboard), a intégré le dispositif athlètes SNCF (le 03/07/2020). Est-ce une volonté de la SNCF d’aller vers les nouvelles disciplines olympiques (breaking, escalade, skateboard et surf) ?
"Nous n’avons pas l’ambition d’aller à tout prix sur ces nouvelles disciplines. La SNCF est historiquement plus tournée vers les sports de combat, les sports d’eau et les sports d’hiver. Il s’agit surtout de parcours et de valeurs communes ainsi que d’un projet à construire ensemble. Vincent Milou a signé une Convention d’Insertion Professionnelle et occupera le poste de chargé de projets sportifs à la direction des gares d’Île-de-France. Il a donc une vraie logique entre sa pratique, souvent opérée proche des gares ou des lieux de connexions multimodales, et l’exploitation de cet espace par la commune."
Laurent GUILLEMETTE, Directeur des grands évènements sportifs SNCF