L’année 2020 s’est terminée par ta qualification aux Jeux Olympiques de Tokyo. Une conclusion positive à une année très particulière. Comment as-tu appréhendé cette compétition et quelles sont tes prochaines échéances ?
K.M. : Cela faisait vraiment longtemps que je n’avais pas fait de décathlon, pratiquement deux ans. Il y avait donc évidemment un peu d’appréhension. Plus le temps sans compétition passe, plus on doute de ses capacités. Mais dès que les épreuves ont commencé, j’ai retrouvé mes marques. Il y avait vraiment une très bonne ambiance, et une sorte d’euphorie. Concernant Tokyo, c’est la première fois que je suis qualifié aussi tôt pour les Jeux Olympiques.
Je vais donc vraiment avoir le temps de me préparer et pouvoir faire attention pour éviter tout pépin physique. J’ai repris ma préparation début janvier, après environ 15 jours de vacances. Je participerai peut-être aux championnats d’Europe en salle début mars en heptathlon et à plusieurs petites compétitions mais il n’y aura pas de gros décathlon avant les Jeux. Je sais que si j’arrive là-bas en forme, je pourrai vraiment m’exprimer.
Tu as publié un livre en fin d’année dernière. Quelle est la genèse de ce projet et quels messages souhaitais-tu faire passer par ce biais ?
K.M. : C’est initialement mon avocate qui trouvait ce projet intéressant. Au début je n’étais pas particulièrement partant, mais elle m’a convaincu, en me disant que c’était le meilleur moyen de transmettre mon expérience. J’ai fait un certain nombre d’interviews mais à travers ce livre, j’ai pu aller beaucoup plus loin, offrir quelque chose de plus profond. Mon objectif est vraiment de transmettre ma passion du sport et de faire partager ce que c’est que de vivre de cette passion justement. De nombreuses personnes arrivent à la retraite avec des regrets, je ne veux pas que ce soit le cas, alors j’essaye de vraiment m’impliquer dans les choses qui me plaisent.
On connaît bien Kevin Mayer dans le stade mais on connaît moins Kevin Mayer hors du stade. Quand tu ne t’entraînes pas, à quoi aimes-tu consacrer ton temps ?
K.M. : Je ne suis pas forcément quelqu’un qui se prend de passion pour de nombreuses choses mais je suis vraiment un grand passionné de sport en général, notamment de basket et de beach-volley. J’aime aussi beaucoup l’astronomie, je fais par exemple de l’astrophotographie et j’ai un télescope chez moi. Je lis aussi très régulièrement, à la fois des mangas, des romans mais aussi des publications scientifiques. En ce moment, je partage mon temps entre trois livres : un de Nassim Nicholas Taleb, qui est statisticien ; One Piece, un manga ; et le dernier J.K. Rowling. Et j’aime aussi regarder des séries : The Big Bang Theory, Friends, Games of Thrones, etc.
Le septième commandement de ton livre s’intitule « Citoyen du monde tu seras ». Y a-t-il des causes qui te tiennent particulièrement à coeur ? En quoi est-ce important selon toi que les sportifs participent à donner de la visibilité à des sujets de société ?
K.M. : Je suis particulièrement attaché aux questions environnementales et au sujet de la lutte contre le dopage. Mais plus globalement, j’accorde beaucoup d’importance à la citoyenneté, au fait de ne pas évoluer individuellement mais en société, avec tout le monde. En tant que sportifs de haut niveau, nous avons la chance d’avoir une forte visibilité. Si des sujets nous tiennent vraiment à coeur, nous avons un pouvoir de parole qui est fort et que nous devons utiliser. Grâce à mes performances, j’ai pu m’impliquer sur ces sujets particulièrement importants pour moi et profiter de ma notoriété pour leur donner de l’écho.
Dans la campagne de voeux des athlètes de la FDJ Sport Factory parue dans l’Equipe, tu exprimais ton souhait pour la nouvelle année ainsi : « Plus de travail en commun entre les écoles et les clubs, montrer aux enfants qu’il y a forcément un sport pour chacun et que la notion de plaisir vient avec la pratique, pas forcément avec les résultats ». Pourquoi est-ce si important pour toi ?
K.M. : Le sport est vraiment une mine d’or pour l’apprentissage, je l’ai vécu directement. C’est l’une des raisons pour lesquelles j’aimerais qu’il soit beaucoup plus mis en avant dans la société, et notamment à l’école, qui a un rôle important à jouer. Je pense vraiment que les résultats viennent du plaisir et non l’inverse. C’est en prenant énormément de plaisir à faire ce que je fais que j’ai eu des résultats. De nombreuses personnes rêvent de performer en regardant les athlètes à la télévision, mais c’est en trouvant ce que l’on aime vraiment que l’on va avoir envie de s’entraîner, de pratiquer plus, et ainsi devenir plus fort et obtenir des résultats.