Le naming des enceintes et des compétitions sportives, en France, se heurte à des problématiques de reprise dans les médias. Cela freine le développement de cette pratique qui rapporte des millions en Allemagne et aux Etats-Unis.
Et l'U Arena de Nanterre devient le Paris La Défense Arena. Tout juste validé par le conseil d’administration de Paris La Défense, ce naming est une pierre de plus à la construction d’un marché qui se solidifie. En France où le naming était inexistant une décennie plus tôt, la pratique a connu une nette progression avec une douzaine d’enceintes pourtant le nom d'un sponsor aujourd’hui (Groupama Stadium à Lyon, Allianz Rivierra à Nice, Matmut Atlantique à Bordeaux), contre seulement huit en 2015. Celles-ci sont soumises à des contrats sur huit ans en moyenne pour 1,8 million d’euros annuels, selon le Centre de droit et d’économie du sport (CDES).
Cependant, les 49 contrats de naming actifs chez notre voisin allemand, s’étalant sur 16 ans et 3 millions d’euros annuels en moyenne, remettent en perspective ce développement, loin des niveaux des marchés internationaux. Champion du naming, le marché américain est une référence, où par exemple 27 des 30 franchises de basket en NBA jouent dans des salles portant le nom d’une marque. En moyenne, les contrats sont conclus sur une durée de 20 ans et évalués de 4,5 à 5 millions d’euros par an pour les stades ; des chiffres légèrement plus faibles pour les arenas avec des contrats sur 17 ans à 4 millions d’euros en moyenne, selon Lagardère Sport.
Un marché porteur en France
L’écosystème sportif français riche en opportunités se prête parfaitement à ce schéma partenarial, où un annonceur donne son nom à une compétition, une enceinte ou une équipe sportive dans le cadre d’un contrat passé avec un détenteur de droits. Cette pratique souligne d’abord l’attractivité des championnats français.
Les détenteurs de droits et les marques concluent des partenariats bénéfiques aux deux parties : d’un côté, le détenteur de droits reçoit des revenus importants pour son modèle économique, qui peuvent servir le sport amateur et professionnel ; de l’autre côté, les marques bénéficient de retombées médiatiques, d’impact positif sur leur image de marque, tout en créant du brand content ou du trafic dans leurs points de vente existants. La Lidl Starligue liant la Ligue nationale de handball (LNH) et Lidl ou encore le naming de la Ligue 1 Conforama conclu entre la Ligue de football professionnel (LFP) et Conforama ont chacune apporté beaucoup aux deux parties prenantes.
La dynamique a aussi permis la modernisation d’enceintes historiques. Entre d’importantes rénovations et de nouveaux noms, l’AccorHotels Arena et l’Orange Vélodrome représentent deux cas illustrant cette tendance. L’AccorHotels Arena est devenu un véritable outil de communication pour le groupe AccorHotels, lui permettant d’installer sa nouvelle identité en France et à l’international, en plus d’être une vitrine de son savoir-faire en termes d’hospitalité. De son côté, le projet de l’Orange Vélodrome souligne l’ambition d’allier tradition et modernité, en respectant l’ADN du stade tout en optimisant son potentiel grâce notamment à la mise en avant de la technologie de la marque.
La richesse du marché français permet également l’implication des marques dans le naming d’équipe, à l’image de la Française des jeux et son équipe cycliste emblématique (désormais Groupama-FDJ) sur les routes du Tour de France. Cette pratique est aussi historiquement présente en voile, où les financements générés par les contrats de naming de bateaux permettent à des navigateurs d’exercer leur profession aux couleurs des marques qui les accompagnent : Armel Le Cléac’h aurait-il remporté le Vendée Globe sans son «namer» Banque populaire ? Autant d’arguments en faveur d’une pratique porteuse d’opportunités économiques, mais qui peine encore à réellement s’affirmer.
Frustration des «namers»
Au-delà d’une frilosité de certaines collectivités ou encore de réticences exprimées parfois par l’opinion publique vis-à-vis d’une pratique propre au secteur privé, c’est bien la reprise des noms par les médias qui cristallisent les tensions. Pendant qu’une marque titre attend une citation du nom à hauteur des investissements consentis, rien n’oblige un diffuseur ou un journal à communiquer le nom complet d’une compétition ou d’un stade, le tout alimenté par une culture journalistique plutôt réfractaire à cette pratique. Bien souvent, les médias vivent exclusivement de leurs revenus de publicité et peuvent sentir leur modèle menacé par le naming.
Mais quelle frustration de ne pas être nommé par son nom, surtout lorsqu’il vous a coûté des millions ! La logique partenariale propre au naming prend tout son sens quand il s’agit de surmonter ces obstacles. Le partenariat entre la Ligue nationale de basket, le constructeur automobile Jeep et le diffuseur RMC Sport dans le cadre de la Jeep Elite (championnat de France de basket-ball, NDLR) en est un exemple parfait, où chaque acteur affirme avoir trouvé son compte, permettant de progresser sur des relations saines.
L’enjeu est de diffuser ces bonnes pratiques auprès des trois parties concernées par le naming afin d’encourager le dialogue. Cela permettra à chacun de mieux se comprendre et enfin profiter pleinement du naming, gage de nouvelles opportunités pour l’économie du sport français dans son ensemble.
Magali Tézenas du Montcel, Déléguée Générale de SPORSORA