Comme nous avions eu l’occasion de le souligner à l’occasion de la dernière réunion de l’Observatoire du naming organisée par Sporsora et le CDES en collaboration avec Lagardère Sports and Entertainment et Kantar, le naming de compétitions ou d’évènements sportifs reprend des couleurs après avoir subi un léger contrecoup au carrefour des années 2000. Nous souhaitions donc profiter de cette première newsletter de l’année pour mettre en lumière cette pratique sur le marché français. D’autant plus qu’au-delà de toucher des évènements sportifs ou compétitions fortement médiatisés, les « pratiquants du dimanche » auront également surement remarqué une tendance nouvelle et en croissance au naming d’évènements sportifs de masse.
Du naming d’évènements médiatisés…
Lidl Starligue, Jeep Elite, Ligue 1 Conforama, Dominos Ligue 2, Coupe de la Ligue BKT, Synerglace Ligue Magnus… Le naming de compétitions sportives semble avoir retrouvé un second souffle. Plusieurs de ces accords avaient d’ailleurs fait l’objet de présentation à l’occasion des dernières réunions de l’Observatoire du naming. Au-delà de ces évènements sportifs réguliers, des évènements réguliers mais ponctuels savent également tirer parti de ce regain d’intérêt des annonceurs.
De très nombreux exemples existent ainsi dans le domaine de la voile qui, comme le cyclisme, est historiquement très ouverte aux sujets de naming notamment pour ce qui concerne les bateaux financés par les annonceurs. Mais le naming dépasse le cadre des équipages et touche aussi les courses elles-mêmes. On citera, sans souci d’exhaustivité, la Transat Jacques Vabre, la Volvo Ocean Race ou encore la plus récente Solitaire Urgo Le Figaro. Cette dernière est d’ailleurs asses originale pour deux raisons : d’une part, car il s’agit d’une opération de co-naming (à l’image de l’équipe cycliste Groupama-FDJ) touchant une épreuve (« La Solitaire ») étant déjà en elle-même une marque puissante ; d’autre part, du fait de l’identité du namer le plus récent (Urgo depuis 2017) dont le rapport avec la voile n’est pas immédiat. Les équipes marketing auront certainement un gros travail de story-telling à mettre en œuvre à ce niveau. Le montant n’a pas filtré, mais Eric Bompard, co-namer précédent, a indiqué qu’il versait 550 000 euros aux organisateurs auxquels s’ajoutaient des achats d’espaces dans Le Figaro (400 000 euros). Nul doute que le contrat signé par Urgo sera au moins aussi avantageux.
Le tennis n’est pas en reste avec l’implication assez forte de nombreux partenaires dans des opérations de naming. Citons notamment les cas de Rolex avec le Rolex Paris Masters, l’horloger suisse ayant succédé en 2017 à BNP avec un montant annuel supérieur aux 10 millions d’euros dont s’acquittait la banque française et un contrat courant jusqu’en 2026, le Monte-Carlo Rolex Masters, et celui d’Engie, très investi dans le tennis féminin avec un soutien à 14 tournois WTA parrainés.
Enfin, l’équitation constitue aussi un terrain de jeu prisé par les annonceurs. On citera notamment le Longines Paris Masters ou encore, dans une version de naming géopolitique le Qatar Prix de l’Arc de Triomphe qui coûterait 6 millions d’euros par an à l’émirat (90 millions au total, le contrat courant de 2008 à 2022).
Au naming d’évènements sportifs de masse
Au-delà de ces opérations de naming concernant des évènements puissants médiatiquement, la tendance commence progressivement à gagner du terrain et à toucher des évènements sportifs de masse ouverts à tous les publics. S’il est difficile d’avoir une vue très précise sur ce phénomène tant le nombre d’organisations est important – et donc les accords existants ou potentiels nombreux – quelques illustrations peuvent être données, notamment en ce qui concerne les épreuves de running. Ainsi, si vous avez appris avec regret le report à l’automne – gilets jaunes obligent – de l’Ociane Matmut Marathon de Bordeaux, certains d’entre vous ont peut-être chaussé leurs baskets pour prendre part à la Course du Grand-Paris Express (dans le même style de naming territorial que celui de la Paris La Défense Arena ou de la Sud de France Arena) qui s’est tenue le week-end dernier (31 mars), quand d’autres finissent de se préparer et attendent désormais fébrilement d’affronter les 42,195 km du Schneider Electric Marathon de Paris (14 avril). Et comme il en faut pour tous les goûts, les moins téméraires opteront peut-être plutôt pour les Adidas 10k Paris.
Au niveau des montants, difficile d’obtenir des informations officielles. Tout juste pourra-t-on citer le montant évoqué dans la presse pour le marathon de Paris fait état d’un contrat d’un millions d’euros annuel. Mais l’essentiel et ce que nous voulions souligner par cet article est sûrement ailleurs et notamment dans l’intérêt réciproque que se portent annonceurs et organisateurs. Comment l’expliquer ? Côté annonceurs, la raison semble relativement évidente. Avec un tarif relativement raisonnable, ce type d’opérations permet de communiquer directement auprès des participants à ce type d’évènements et les accompagner dans l’accomplissement de leur performance sportive (tant au niveau de leur préparation que lors de l’épreuve le jour J) permet à la fois un développement de leur notoriété, mais aussi de leur capital sympathie. Au-delà, d’autres accords peuvent aussi être vus dans une perspective plus globale d’implantation dans une discipline sportive ou sur un territoire à l’image de l’arrivée de Matmut sur le marathon de Bordeaux, quelques mois après avoir signé le contrat de naming du stade. Enfin n’oublions pas non plus les opérations originales que peuvent développer les annonceurs sur ce type d’évènements que ce soit à vocation interne (team building, développement du sport en entreprise) ou externe (en proposant des actions originales à leurs clients).
Côté organisateurs, la raison se veut certainement bien davantage économique. Les moyens mobilisés pour l’organisation de ces évènements sont en effet particulièrement importants et ne tendent pas à se réduire du fait des coûts de sécurité qui pèsent notamment de plus en plus lourd. Les seules inscriptions ou les accords de sponsoring classiques ne suffisant plus nécessairement à résoudre l’équation comptable, le naming peut donc présenter un moyen à même de dégager de nouvelles ressources.
Christophe Lepetit, Responsable des études économiques, CDES