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Quel bonheur de voir la ferveur qui porte nos bleues pendant cette Coupe du Monde féminine de la FIFA, France 2019 ! Des audiences historiques dont les 11,9 millions de téléspectateurs devant le huitième de finale France-Brésil, des dispositifs TV équivalents à ceux de compétitions masculines sur TF1, TMC et Canal+, des partenaires qui s’engagent avec des grandes marques comme adidas, Arkema, EDF, Hyundai, Orange...
Mais ne nous y trompons pas : le véritable enjeu de cet événement est bien de faire perdurer l’attractivité du sport féminin sur le long terme.
Il est vrai que les tendances sont vertueuses. TF1 a déboursé une somme 14 fois plus importante que l’édition précédente pour les droits de diffusion de la Coupe du Monde féminine de la FIFA, à hauteur de 12 millions d’euros. Les partenaires suivent et le public est plus réceptif, à l’image des 69% des français déclarant avoir une meilleure image d’une marque engagée dans le sport au féminin (Kantar TNS, 2018) avec des qualificatifs qui lui sont spécifiques comme « sain, ouvert, propre, inspirant, accessible », des valeurs différentes du sport masculin (Nielsen Sports, 2017).
Par ailleurs, bien qu’en nette progression, seulement 18,5% du sport télévisé en France concernait des compétitions féminines en 2018, selon le CSA. En terme de gouvernance, les femmes n’occupaient que 17% des postes d’encadrement du sport fédéral en 2016. Même constat dans le sponsoring sportif où 80% des montants sont alloués aux sports masculins. Le potentiel de développement est important !
Reflet de la situation dans notre société, le sport a néanmoins de nombreux atouts dont sa puissance médiatique afin de faire bouger les lignes. Jusqu’alors, les convaincus parlent aux convaincus ; le sport féminin a besoin de faire évoluer son discours pour passer un palier, en s’adressant aux non initiés ou autres sceptiques. Trois axes peuvent être privilégiés.
Avant toute chose, les athlètes elles-mêmes qui jonglent entre une autre activité professionnelle, les entraînements, les compétitions internationales pour lesquelles il n’est pas rare qu’elles assument leurs déplacements, parfois même plusieurs logements entre club et sélection nationale. Elles ont besoin de moyens pour se concentrer sur leur vocation. Entre autre des partenaires pour alimenter le cercle vertueux du financement, de la performance, de la visibilité et ainsi créer un modèle économique pérenne. Par exemple, la plupart des joueuses de football n’ont pas de contrat professionnel, celles qui ont la chance d’avoir un salaire touchent en moyenne 2 500 euros mensuels en D1 féminine (30 fois moins que le salaire moyen d’un joueur de Ligue 1 Conforama).
Le deuxième axe repose sur les épaules des détenteurs de droits et des médias. Lorsqu’il est bien produit avec un enjeu, un grand stade, un storytelling relayé, le sport féminin attire les foules ; lorsque le sport masculin se retrouve dans un petit stade avec un faible enjeu sportif, le public est moins nombreux : le match des bleues face à la Norvège le prouve avec une audience de 10,3 millions de téléspectateurs le 12 juin dernier, deux fois supérieure à celle du match des hommes Andorre-France diffusé deux jours plus tôt. 84% des français se déclarent autant intéressés par le sport féminin que par le sport masculin : à l’instar des hommes, il faut donc améliorer les lignes éditoriales et les conditions de production des championnes ! Cela attirera des marques partenaires sur un territoire d’expression encore peu préempté.
Enfin, les acteurs du sport doivent encourager d’avantage les investissements dans le sport féminin. Pour ce faire, plusieurs planètes doivent s’aligner, à commencer par la législation qui pourrait par exemple favoriser les partenaires engagés sur le long terme. La création de l’Agence Nationale du Sport doit aussi soutenir des dispositifs dédiés au développement du sport féminin, sur le modèle du fonds d’aide à la production audiovisuelle du feu CNDS par exemple. Ajoutez à cela une bonne dose de sensibilisation sur les raisons d’investir dans le sport féminin et nous verrons de plus en plus d’acteurs s’impliquer, à l’image d’Arkema, déjà « supporter national » de la Coupe du Monde et qui vient d’annoncer le naming de la D1 féminine de football. Pour cette marque, être partenaire de la Coupe du Monde féminine de la FIFA, France 2019 permet d’acquérir une visibilité internationale, de travailler sa marque employeur et d’entrer en proximité des parties prenantes des territoires sur lesquels elle est implantée. Arkema rejoint Butagaz, namer de la Ligue féminine de handball, et d’autres marques déjà engagées dans le sport au féminin depuis de nombreuses années telles qu’Engie, La Française des Jeux, Société Générale ou encore la RATP.
De beaux exemples démontrant que les acteurs du sport prennent bien en main le sens de leur histoire.
Ce soir nous devons être tous BLEUES car cela dépasse le cadre d’un simple match de football.
Magali TEZENAS DU MONTCEL, Déléguée générale de SPORSORA