Renault revient dans votre portefeuille de partenaires. Pourquoi un tel délai entre l’annonce des négociations exclusives (01/02/2020) et la signature de l’accord (21/09/2020) ?
"Nous ne souhaitions pas annoncer ce partenariat en période de crise, l’urgence étant à la préparation du confinement sur nos activités. Avec les matches de l’automne 2020, Renault trouvait une fenêtre intéressante pour annoncer son accord et l’activer. La FFR a, conjointement avec Renault, annoncé l’accord, plutôt orienté autour du XV de France masculin, quatre jours avant le lancement de la campagne TV de Renault.
Accueillir Renault s’accorde avec notre volonté stratégie de marketing et notre ancrage français. Tous nos partenaires majeurs et nos partenaires officiels sont des entreprises françaises. Accueillir Renault, c’est aussi accueillir l’un des plus gros annonceurs français à la TV, lequel met en scène notre marque et notre sport."
Comment le Covid a-t-il impacté votre activité sponsoring ? La perspective de la Coupe du monde 2023 a-t-elle permis de maintenir un fort intérêt pour le rugby malgré la crise ?
"La perspective de la Coupe du monde 2023 est extrêmement intéressante pour nous. Alors certes, certaines discussions avec des prospects se sont arrêtées, des entreprises qui avaient perdus de l’activité commerciale pendant le confinement, mais de nombreuses discussions sont encore en cours. Celles-ci prennent plus de temps, mais on sent chez nos interlocuteurs l’attrait du XV de France, notamment en vue du Mondial 2023, via son renouveau sportif récent. Le XV de France reste une marque attractive malgré la crise.
La crise et la jauge de 1 000 personnes (ou le huis-clos), nous empêchent d’abord de réaliser de l’activité commerciale extérieure, soit des ventes additionnelles par rapport à nos contrats.
Elle a aussi impacté un pan moins connu de notre activité : les séminaires. Le Centre National du Rugby de Marcoussis (Essonne) accueille en effet une très grosse activité de séminaires, une activité réduite à peau de chagrin à cause du Covid-19, d’autant plus que les protocoles sanitaires nous obligent à réduire la jauge des salles disponibles. Pendant la fenêtre internationale de l’automne 2020, le CNR, protocole sanitaire oblige, sera ainsi une bulle autour des équipes de France pour éviter que les salariés et les personnes en séminaire ne croisent les joueurs et le staff. Le CNR sera ainsi sanctuarisé de mi-octobre à mi-décembre 2020 et il n’y aura donc qu’une très faible activité séminaire.
Un dernier impact pour notre activité : les collaborateurs des équipes sponsoring et marketing ont, comme le reste des employés de la FFR, tous été mis en télétravail et ne sont donc plus présents sur site."
Comment vous projetez-vous sur la « Autumn Nations Cup » et la fin du Tournoi des 6 Nations ? Avez-vous prévu différentes hypothèses d’activations en fonction des mesures sanitaires ?
"La période est évidemment très compliquée et nous sommes bien obligés de faire avec les contraintes de l’État qui s’imposent à nous. Nous faisons plusieurs hypothèses, puis des arbitrages, sachant que nous sommes passés d’une hypothèse de plus de 50 % de la capacité du Stade de France au milieu de l’été, à 5 000 en août, puis 1 000 spectateurs début octobre, puis au huis clos (suite à l’instauration du couvre-feu). On jongle avec cela pour essayer de satisfaire au maximum nos partenaires face aux clauses de leurs contrats.
Il n’y aura aucune prestation d’hospitalité. Nous abandonnons aussi la quasi-totalité de nos activations créant de l’interaction. Les « escort kids » d'Orange sont annulés pour éviter les contacts entre enfants et joueurs. Nous conservons les ramasseurs de balles Société Générale, indispensables au bon fonctionnement de nos matches.
En revanche, la Fédération innove et propose donc de nouveaux dispositifs pour intéragir avec les fans et mettre en avant l’ensemble du rugby amateur. Nous proposerons ainsi aux fans du XV de France masculin d’être présents au premier rang, à l’aide d’un dispositif de visioconférence incrusté sur la panneautique LED autour du terrain et le nom des 1 941 clubs amateurs seront répartis sur les maillots des XV de France."
Avez-vous prévu de renforcer le volet digital de vos partenariats pour compenser en partie le manque de visibilité offerte aux partenaires ? De quelle manière ?
Nous mettons en place beaucoup plus de choses via le digital, c’est certain. Avec la crise, les partenaires n’ont pas eu la possibilité de côtoyer le XV de France et donc de faire un shooting. Pour le lancement du nouveau maillot le coq sportif, nous avons demandé aux joueurs de se filmer eux-mêmes en civil et en tenue, puis nous avons posté un montage, une vidéo que les partenaires pouvaient relayer. Nous prenons cette situation sanitaire comme une opportunité de raconter une histoire différente. Il nous faut alors imaginer des choses et être force de proposition pour nos partenaires.
Depuis quatre ans, la FFR a créé une direction de la communication et du numérique pour faire la transformation de notre Fédération. Au service commercial, nous pouvons ainsi bénéficier désormais de ce renfort éditorial qui nous permet de donner de la visibilité complémentaire à nos partenaires via ces nouvelles plateformes. Ensuite, nous devons amorcer la phase d’étude d’impact pour nos partenaires, soit mettre en place des outils pour ensuite pouvoir analyser.
Comment définissez-vous les offres proposées par la FFR (package définis, offre à la carte, etc.) ? Comment a évolué votre hiérarchie sponsoring ? Envisagez-vous de la simplifier encore ?
"Il y a les incontournables (LED, billetterie, etc.), mais ce qui change, c’est ce que l’on va vouloir raconter. L’objectif est d’avoir des partenaires engagés autour de thématiques comme la responsabilité sociale et la transformation écologique.
Au CNR, par exemple nous avons mis en place l’usage de zéro produit phytosanitaire, notre système de retraitement des eaux est assez avancé, et nous aimerions que des partenaires nous aident à être encore meilleurs sur ces sujets-là. Autre exemple, un élément clef de notre département d’accompagnement à la performance est la nutrition. Nous pourrions envisager de proposer des contenus autour de cet aspect, impliquant notre nutritionniste, à un groupe agroalimentaire.
Depuis quatre ans, nous nous structurons pour proposer ce type d’idées et de nouveaux assets sponsoring ainsi que pour créer du servicing et des activations hors contrat. Dans le cadre de notre accord avec Orange, partenaire de nos écoles de rugby, nous produisons avec eux des contenus dédiés autour de l’éducation numérique. Nous avons aussi co-construit des pages dédiées à cette thématique pour le livret du jeune joueur. Il s’agit de faire en sorte que les partenaires participent à la vie de la Fédération."
Un sponsor peut-il s’engager uniquement avec France 7 ou le rugby féminin ?
"Il est possible pour une marque d’être partenaire uniquement du rugby féminin, mais cela englobe alors la partie amateure, les compétitions Elite 1 et Elite 2 (championnat pro des femmes) et l’équipe de France 7. Altrad est d’ailleurs le sponsor maillot principal uniquement pour le XV de France.
De la même manière, une marque peut se lier au centre dédié à la performance et à ses 26 hectares et cinq terrains de rugby, dans une logique de droits d’exploitation, ce qui a d’autant plus d’intérêt car la communauté d’agglomération de Paris-Saclay, où se situe le CNR, a obtenu le label « Terre de Jeux » de Paris 2024. Le CNR est donc Centre de Préparation aux Jeux (CPJ) et devrait accueillir des fédérations étrangères et les exposer à ces marques potentielles. La Nationale, Championnat nouvellement créé, est également dans notre giron, mais reste un Championnat amateur offrant moins de visibilité et et ne constitue pas une offre seule."
Conseillez-vous à vos partenaires de prendre des joueurs comme ambassadeurs pour compléter leurs dispositifs ?
"C’est notre rôle de faire en sorte qu’ils exploitent au mieux notre partenariat. Nous leur concédons l’image collective du XV de France avec un minimum de trois joueurs pour leur plan marketing. Nous ne pouvons pas leur garantir de joueurs additionnels pour des dédicaces ou des séminaires par exemple. Avoir un joueur en tant qu’ambassadeur renforce l’impact du partenariat, c’est certain. C’est pourquoi Orange ou la Société Générale le font."
Alexandre ANGINOT, Responsable Marketing et Commercial à la Fédération Française de Rugby