« Autour de la Karmine Corp (LFL), il y a un engagement qui est sans commune mesure par rapport à ce qu’on a pu voir dans le passé et sur ce que l’on peut voir actuellement sur le marché. L’accueil qu’Orange a reçu en tant que sponsor, c’est du jamais vu ! C’est une des raisons qui nous ont amené à travailler avec la KCorp, cet engagement, cette fanbase » déclare Stéphane Tardivel, directeur sponsoring, partenariats et événementiel chez Orange, à News Tank, le 17/01/2022.
L’opérateur français de télécommunications est devenu le partenaire majeur et le sponsor maillot principal de la Karmine Corp pour les saisons 2022 et 2023. Le club esport français est dirigé par le streamer Kamel « Kameto » Kebir (1,1 million d’abonnés sur Twitch) et le créateur de contenus Amine « Prime » Mekri.
« Orange est une marque qui n’a plus besoin de travailler sa notoriété. Tout le monde sait ce que l’on fait, tout le monde sait qui on est. Nos enjeux ne se situent plus à ce niveau. On veut travailler sur la préférence de la marque. La façon de consommer les médias est complètement différente dans les communautés esport / gaming, c’est très difficile pour des marques comme nous d’aller les chercher, d’aller leur parler. D’où le fait de s’associer à la Karmine Corp, qui a déjà les codes de communication pour s’adresser à ces communautés », explique Stéphane Tardivel.
« Dans l’esport, des marques ont commis l’erreur de vouloir trop s’imposer comme des évidences, en passant des accords de naming qui n’étaient pas appropriés. Chacun doit rester à sa place. Quand Orange est venu sur la discipline, on savait que ça allait prendre du temps. On ne va pas devenir légitime du jour au lendemain. On n’a aucune légitimité dans l’esport ! Ce sont les gens qui font l’esport qui sont légitimes, les streamers, les casters, les équipes. Peut-être que dans 10 ans, on sera vu comme un acteur légitime de cet écosystème. Mais c’est encore trop tôt », souligne le directeur sponsoring du groupe Orange depuis 2008.
« Notre légitimité est dans le réseau. Ce qui a intéressé la Karmine Corp en s’associant avec nous est qu’Orange a une véritable réputation de qualité sur les réseaux. On a donc un positionnement qui ressemble un peu à celui d’un équipementier. Pour jouer au foot il faut de bons crampons. De la même manière, il faut un bon réseau pour jouer aux jeux vidéo, pour caster (animer) et pour streamer (diffuser en direct) dans de bonnes conditions. C’est là où nous tirons notre épingle du jeu », indique Stéphane Tardivel qui répond aux questions de News Tank.
Comment en êtes-vous venus à signer avec la Karmine Corp pour 2022 et 2023 ?
“L’esport est un petit écosystème en France, tout le monde se connaît. Les représentants de la Karmine Corp ont souhaité nous rencontrer en 2021. Ils savaient qu’Orange était en fin de contrat avec Team Vitality (à l’issue de 2021). Ils avaient envie de nous parler de leur projet, de leur développement, de leur vision, de l’avenir. Et voilà le résultat de ces discussions !
En 2021, parmi les communautés esport les plus engagées sur Twitter dans le monde, il n’y avait qu’une équipe française dans le Top 10, la Karmine Corp, alors que l’équipe n’évolue principalement que dans le Championnat de France de League of Legends (LFL). Ce qui nous intéresse beaucoup dans Karmine Corp, au-delà de l’aspect purement sportif, c’est cet angle porté par ses deux cofondateurs, les influenceurs Kamel « Kameto » Kebir et Amine « Prime » Mekri qui engagent cette communauté, qui l’embarquent.
Autour de l’équipe, il y a un engagement qui est sans commune mesure par rapport à ce qu’on a pu voir dans le passé et sur ce que l’on peut voir actuellement sur le marché. Nous en avons fait l’expérience (le 08/01/2022) lors du lancement et de l’annonce du partenariat (à l’occasion d’un match de gala de la KCorp organisé au Carrousel du Louvre, à Paris). Les chiffres sont absolument étonnants en termes d’engagements. L’accueil qu’Orange a reçu en tant que sponsor, c’est du jamais vu ! C’est l’une des raisons qui nous ont amenés à travailler avec la Karmine Corp, cet engagement, cette fanbase.
L’engagement autour de Team Vitality n’était-il pas au niveau de vos espérances ?
Les deux cofondateurs de la Karmine Corp sont véritablement engagés au sein de l'équipe elle-même. Le fait d’avoir cette garantie-là était très important pour nous. C’était un peu moins le cas avec Team Vitality. Nous ne remettons pas en cause notre partenariat (entre 2018 et 2021). Nous avons mené un excellent partenariat avec eux. Mais effectivement, la partie engagements et influenceurs, pour nous, ce n’est pas un détail. L’engagement de leur communauté est sans commune mesure. Ils ont aussi de belles ambitions sportives, cela se voit avec leur recrutement (transfert de Martin “Rekkles” Larsson en provenance de G2 Esports).
En plus, la Karmine Corp n’est pas présente sur des jeux difficiles à sponsoriser en visibilité pour nous. Ils n’ont pas la volonté de se développer sur des jeux tels que Call of Duty ou Counter-Strike. C’est un point positif pour nous.
Vous êtes donc à l’initiative de la fin de votre partenariat avec Team Vitality…
Non, on n’a pas arrêté du tout. Dans les contrats, il y a un début et une fin. Nous nous sommes vus avec Team Vitality, nous avons discuté, et nous nous quittons en très bons termes, fiers de notre partenariat de trois ans. Pour rappel, lorsque nous nous sommes engagés avec Team Vitality en 2018, le développement de l’équipe était similaire à ce que connaît actuellement la Karmine Corp. Team Vitality est passé à un autre niveau par rapport aux investisseurs qu’ils ont su trouver. Nos ambitions et objectifs ne sont pas forcément les mêmes. Ils ont trouvé un autre partenaire principal (Tezos, blockchain), et nous sommes très heureux pour eux. On leur souhaite beaucoup de réussite pour la suite en LEC.
Votre accord a-t-il été passé avant l’annonce du transfert de la star suédoise de LoL Martin « Rekkles » Larsson à la KCorp, en provenance de G2 Esports ?
Oui. Recruter un tel joueur est une décision qui montre le sérieux et la volonté de développement de la Karmine Corp. Ce qui a aussi séduit Rekkles, c’est la fanbase de l’équipe. C’est lui-même qui le dit, c’est ce qui lui a manqué lorsqu’il est passé chez G2 (en provenance de Fnatic en 2021).
Orange est impliqué dans l’esport depuis plusieurs années désormais. Quels enseignements avez-vous pu en tirer ?
Nous avons commencé en 2015. Avant notre partenariat passé avec Team Vitality en 2018, nous avons été avec Millenium Team (équipe qui n’existe plus désormais). Nous avons donc déjà croisé beaucoup d’acteurs de ce milieu, dont Kameto.
Il y a des similitudes avec le monde du sport traditionnel, notamment sur la partie compétitive. Mais l’esport va extrêmement vite. Si vous ne faites pas partie de l’écosystème esport, vous n’existez pas, contrairement au sport traditionnel où vous pouvez exister par rapport à de la visibilité diverse et variée. Le milieu va tellement vite. Si vous n’êtes pas au cœur de l’écosystème, vous en êtes très vite exclus. L’esport n’est pas du tout structuré de la même façon que le sport traditionnel. C’est en train de se mettre en place. Les fédérations, les ligues… le sport traditionnel est très encadré. Les Ligues disposent de mandats pour organiser des compétitions professionnelles. Dans l’esport, ce sont les éditeurs qui sont les maîtres du jeu. Riot Games a décidé de faire une ligue fermée en LEC, une ligue internationale, des ligues au niveau local… c’est eux qui décident. Ils ont tout intérêt à avoir un engouement fort des différents pays. Plus il y a de personnes inscrites sur leur plateforme, mieux c’est pour eux.
Une autre différence importante est que l’on ne sait pas quel va être le prochain jeu à suivre. League of Legends dispose d’une durée de vie assez étonnante pour le milieu. Mais ce n’est pas le cas de tous les jeux. On le voit bien sur Fortnite où cela commence à se tasser sérieusement.
Qu’ambitionnez-vous au travers de ce partenariat avec la Karmine Corp ?
Orange est une marque qui n’a plus besoin de travailler sa notoriété. Tout le monde sait ce que l’on fait, tout le monde sait qui on est. Nos enjeux ne se situent plus à ce niveau. On veut travailler sur la préférence de la marque. La façon de consommer les médias est complètement différente dans les communautés esport / gaming, c’est très difficile pour des marques comme nous d’aller les chercher, d’aller leur parler. D’où le fait de s’associer à la Karmine Corp, qui a déjà les codes de communication pour s’adresser à ces communautés.
De notre côté, notre légitimité est dans le réseau. On estime, à juste titre au regard des études sur le sujet, que l’on a le meilleur réseau. Ce qui a intéressé la Karmine Corp en s’associant avec nous est qu’Orange a une véritable réputation de qualité sur les réseaux. On a donc un positionnement qui ressemble un peu à celui d’un équipementier. Pour jouer au foot il faut de bons crampons. De la même manière, il faut un bon réseau pour jouer aux jeux vidéo, pour caster et pour streamer dans de bonnes conditions. C’est là où nous tirons notre épingle du jeu.
En sponsorisant la KCorp, vous vous alliez également au streamer Kameto, un des plus populaires créateurs de contenus sur Twitch en France. Commente travaillez vous votre marque sur Twitch ?
Nous commençons à le faire. Pour l’heure, Orange n’est pas présent sur la plateforme. Pour l’instant, nous allons essayer de faire des choses avec la Karmine Corp sur Twitch. Nous sommes vraiment en période de construction avec eux.
Quand nous passons un partenariat, ce que l’on regarde, ce sont les forces de l’un et les forces de l’autre. Dès le début de nos discussions, on avait envie de travailler ensemble. Ce qui est très important. Avoir un partenaire qui est juste là pour prendre son chèque, qui n’a pas envie de construire et qui ne reconnaît pas notre valeur ajoutée est la pire des choses. La valeur ajoutée de la Karmine Corp réside dans leur communauté, dans leur image. Nous, notre valeur ajoutée est notre force de communication, mais également celle de notre réseau ainsi que notre crédibilité dans l’écosystème du sponsoring.
Orange est une marque emblématique, très forte. Le fait de s’associer à Orange est toujours important, notamment quand on est en train de développer son équipe. Avoir Orange comme partenaire montre le sérieux du développement de la structure.
Concernant Twitch, nous n’avons pas de volonté de développer en particulier cet 'asset'. Mais nous allons développer des programmes numériques avec la Karmine Corp, comme nous l’avons fait avec une vidéo de 15 minutes pour dévoiler le roster (effectif) 2022 de l’équipe. Nous allons donc financer des programmes numériques.
Vous avez également des comptes dédiés appelé Rush Esport sur les réseaux sociaux…
À l’image de ce que nous avons fait dans le sport traditionnel : nous avons été les premiers à développer des réseaux sociaux pour le football (Team Orange Football, anciennement Le 12e Homme) et le rugby (Team Orange Rugby, anciennement Ensemble avec le XV). Nous étions là avant les Fédérations, avant même les clubs. Nous avons toujours eu la volonté de créer du storytelling et proposer des temps forts.
C’est dans cette même optique que nous avons commencé à développer notre stratégie autour de l’esport avec notre plateforme Rush Esport, toujours avec cette volonté de faire les choses sérieusement. Nous faisons les choses de manière qualitative, nous ne faisons pas la course pour avoir des followers. Et cela marche plutôt bien. Évidemment, la venue de la Karmine Corp nous a offert un boost en termes d’abonnés. Avec l’annonce du partenariat, nous avons gagné entre 6 000 et 7 000 abonnés supplémentaires sur Twitter. Rush Esport approche donc des 90 000 abonnés sur Twitter et dispose de communautés très engagées.
Avant, le sponsoring traditionnel se faisait dans les stades ou dans la presse. Désormais, les réseaux sociaux nous permettent de reprendre la main et de pouvoir raconter notre propre histoire.
Le fait d’être désormais avec la Karmine Corp nous permet de nous adresser aux communautés esport en utilisant les bons termes, les bons mots. Nous ne voulons pas tomber dans un jeunisme qui soit complètement à côté de la plaque.
Peut-on aussi faire des opérations de RSE via du sponsoring dans l’esport ?
Bien sûr ! Nous pouvons faire de la RSE sur ces supports en faisant de la sensibilisation sur les bons usages du numérique comme le recyclage des mobiles. Nous l’avons déjà fait avec Team Vitality, et nous allons également le faire avec la KCorp.
Vous considérez-vous désormais comme un annonceur légitime dans l’esport ?
Quel que soit l’asset sponsoring, la stratégie déployée par Orange ne s’inscrit jamais sur du court terme. Nous aimons raconter l’histoire sur du long terme. Nous sommes dans le football et dans le rugby depuis 25 ans, et nous y sommes ultra légitimes, c’est quelque chose qui s’inscrit dans la durée.
Dans l’esport, des marques ont commis l’erreur de vouloir trop s’imposer comme des évidences, en passant des accords de naming qui n’étaient pas appropriés. Chacun doit rester à sa place. Quand Orange est venu sur la discipline, nous savions que ça allait prendre du temps. Nous n’allons pas devenir légitime du jour au lendemain. Nous n’avons aucune légitimité dans l’esport ! Ce sont les gens qui font l’esport qui sont légitimes, les streamers, les casters, les équipes. Notre légitimité est dans le réseau. Peut-être que dans 10 ans, nous serons vus comme un acteur légitime de cet écosystème. Mais c’est encore trop tôt.
Le service sponsoring d’Orange a-t-il une cellule dédiée à l’esport ?
Oui, une personne est chargée de l’esport à plein temps. J’ai de la chance d’avoir au sein de notre département sponsoring une personne qui connaît parfaitement ce secteur. Nous travaillons aussi avec l’agence JK, qui connaît très bien ce milieu.
Avez-vous d’autres partenariats dans l’esport ?
Non. Nous avons un partenariat technique avec le YouTuber Lucas « Squeezie » Hauchard. Nous équipons ses studios avec notre réseau. Nous avons également deux ambassadrices et ambassadeurs jeux vidéo (Kayane et Aypierre).
En interne, nous engageons les gens autour de l’esport afin qu’ils puissent participer à des rencontres avec des joueurs ainsi qu’à des événements.
Avez-vous la volonté de passer d’autres accords dans l’esport ? En LFL ?
Non, pas pour l’instant. Nous avons été approchés par la LFL et Webedia. Mais pour l’instant, nous avons la volonté de mettre tous nos moyens au service de la KCorp. Contrairement au football où nous sommes avec la FFF et les trois clubs français majeurs (PSG, OM et OL), nous avons la volonté d’être uniquement sur un club dans l’esport.